De ce papier ressortent les défis pour l'implémentation de la démarche de recherche-action participative (RAP) en Haïti traversé par des troubles socio-politiques, surtout au niveau de la Péninsule Sud en proie à une situation de grande vulnérabilité aux catastrophes naturelles. Les périodes d'urgence récurrentes qui y résultent donnent le plein pouvoir aux intervenants externes et entrainent en même temps une perte d'autonomie des communautés locales. Ces dernières sont pourtant enjointes à participer aux initiatives de relèvement, de développement et autres pour répondre aux logiques du « tout participatif » prônées dans des projets sans aucun résultat. Je pars de deux expériences de terrain pour remettre en cause cette injonction à la participation qui ne favorise aucunement le dialogue ou l'implication des savoirs expérientiels des acteurs locaux. Pour tenter de remédier à cette violence épistémique par la RAP, je propose de la fonder sur l'éthique et la responsabilité pour autrui ou de l'altérité éthique tout court tenant compte de notre propre vulnérabilité comme chercheur. Dans cette optique, l'épistémologie du lien est mise en avant comme alternative en vue de construire une « économie sociale de la connaissance » inspirée du mouvement de « buen conocer » en Amérique Latine.